Critiques et interrogations sur la mission Lescure
La mission Lescure, dont la phase de concertation et d’auditions vient de démarrer, suscite quelques critiques et interrogations. « Chargé de mettre l’exception culturelle à l’heure du numérique, l’ex-patron de Canal +, dont le rôle est déjà décrié, se retrouve face à un immense chantier aux contours flous » écrit Libération le 25 septembre, dans un article titré « Pierre Lescure, mission cryptée ». Qualifiant le chantier de « nébulo-pharaonesque », le quotidien estime que « au fil des semaines, la mission Lescure se transforme en fourre-tout où tout le gouvernement s’empresse de remiser tout ce qui contient le mot numérique ». Et de conclure : « Pas de doute, l’usine à gaz est bel et bien lancée ». De son côté, le site Owni titre « Mission Lescure impossible ».
Dans une tribune intitulée « Pourquoi nous ne participerons pas à la mission Lescure », publiée dans Libération le 25 septembre, l’UFC Que Choisir, la Quadrature du Net et le Samup (syndicat d’artistes et musiciens) évoquent « une caricature de débat démocratique » qu’ils se refusent à cautionner. Ils dénoncent « l’étroitesse de vue de la mission » et critiquent le choix de Pierre Lescure pour la mener. « Pour la troisième fois en cinq ans, la mission de définir les orientations des politiques portant sur la culture et Internet est confiée à une personne fortement impliquée dans les intérêts privés de la production, distribution et promotions des médias », s’insurgent les trois organismes, en référence aux missions Olivennes et Zelnik. Ils critiquent aussi l’organisation même de la mission : « Pierre Lescure sera seul, avec un groupe de technocrates sans voix propre, pour décider ce qu’il retient des auditions ».
Deux jours plus tard, toujours dans Libération, c’est au tour de Phillippe Ogouz, président de l’Adami, et Bruno Boutleux, son directeur général, de leur répondre dans une autre tribune titrée « Pourquoi nous participerons à la mission Lescure ». Faisant valoir que « la parole des artistes n’appartient à personne et qu’il ne faut plus la laisser aux mains de ceux qui s’en prétendent les représentants alors qu’ils défendent leurs propres intérêts », ils expliquent qu’ils participeront à la mission parce que « la réponse aux questions soulevées n’est pas juridique ou technique, elle est politique ». L’Adami, qui considère que « Hadopi ou CNM, malgré leur intérêt, sont des trompe-l’œil et n’apportent de ce point de vue aucune solution structurelle durable » défend toujours la gestion collective comme seule solution au développement de l’offre légale, au juste partage de la valeur et à la rémunération des artistes.
Pour sa part, l’UFC Que Choisir se dit désabusé et peu optimiste quant aux résultats de la mission Edouard Barreiro, son directeur des études estime, dans une interview à ZDNet, qu’« une vision trop restrictive » et des conflits d’intérêt l’empêcheront d’aboutir. « Le problème, c’est qu’on se concentre uniquement sur les questions de business. C’est dû au fait qu’en France, la parole est totalement monopolisée par les ayants-droit. Dès qu’on tente de faire entendre une autre voix, on est caricaturé » dit-il.