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Le rapport de la mission Olivennes publié dans les jours à venir

22 Novembre 2007 , Rédigé par Gildas Lefeuvre Publié dans #Musique en ligne

La mission menée par Denis Olivennes est dans sa dernière ligne droite et ses conclusions attendues dans les jours prochains. L’objectif était ambitieux et la tâche délicate, avait convenu la ministre de la Culture Christine Albanel en confiant le 5 septembre dernier au PDG de la Fnac cette mission qui devait permettre la conclusion d’un accord entre professionnels pour dissuader le téléchargement illégal de masse et développer une offre légale attractive d’œuvres musicales, audiovisuelles et cinématographique. « Pas impossible » pour l’intéressé, qui avait prévenu qu’il ne s’agira pas d’un rapport « pour caler une armoire bancale de l’administration » ni « d’une grande solution universelle » mais de « quelques mesures empiriques et pratiques ». Synthétiques aussi, puisqu’il indiquait que ses conclusions tiendraient « sur le recto d’une page A4 ».
 
Auditions et expertises
 
Denis Olivennes et les membres de sa mission – Isabelle Falque-Pierrotin (présidente du Conseil d’orientation du forum des droits sur l’Internet), Pascal Faure (vice-président du Conseil général des technologies de l’information) et Olivier Bomsel (professeur à l’Ecole des Mines de Paris et chercheur au CERN) – ont procédé à une série d’auditions : créateurs, industriels de la musique et du cinéma, ayants droit, diffuseurs de contenu (chaînes de télévision et fournisseurs d’accès à Internet), consommateurs, tous représentés à un très haut niveau. Ils ont également mené une série d’expertises techniques et juridiques sur différents dispositifs possibles de lutte contre la piraterie. Le patron de la Fnac s’est aussi rendu aux Etats-Unis et au Royaume-Uni pour voir comment y est traitée la piraterie. Après analyse de la situation, la mission est ensuite entrée dans sa seconde phase, à savoir des discussions concertées pour aboutir à un consensus.
Les pistes évoquées
 
« Mon objectif est de rendre le piratage plus compliqué et la consommation légale plus facile » a récemment commenté Denis Olivennes, qui considère le dispositif répressif né de la loi DADVSI inadapté pour faire face au piratage de masse. Plusieurs pistes ont été évoquées au cours des travaux : 

- la mise en place de radars, de points de contrôle sur le réseau (les FAI y sont favorables), se traduisant par la distribution automatique d’amendes pour ceux qui piratent, en privilégiant – compte-tenu de l’hostilité des internautes, les dispositifs qui ont « un certain degré d’acceptabilité sociale » ;
- le filtrage en amont, en tête de réseaux, pour bloquer les contenus illégaux, une piste « intelligente », « qui évite la répression », mais dont le degré de fiabilité technique est incomplet et peut induire des comportements de contournement.

- un dispositif d’avertissements et de sanctions, à l’instar de celui mis en œuvre par les Anglais et les Américains, par accord entre ayants droit et FAI, qui a prouvé son efficacité en termes de dissuasion : 70% des internautes cessent de télécharger illégalement après un premier message d’avertissement, 90% après le second message. Reste l’idée d’une suspension temporaire de l’abonnement Internet pour les 10% récalcitrants, mais les FAI n’y sont évidemment pas favorables. Un tel dispositif (soit le concept de riposte graduée, revu et corrigé) s’avère cependant compliqué à mettre en œuvre dans notre droit français et nécessiterait de passer par une autorité publique pour l’appliquer. Trois options sont évoquées : la mise en place d’une autorité administrative indépendante (qui pourrait être l’autorité qui vient d’être créée sur les mesures techniques de protection ?), la création d’une autorité judiciaire dédiée, ou la mise en place d’une procédure judiciaire accélérée. Le Monde rappelle à ce propos que, dans le cadre de la réforme de la carte judiciaire, est prévue la création d’une juridiction dédiée à la propriété littéraire et artistique. 

- enfin, il s’agit de « libérer l’offre légale ». Les internautes se plaignent d’une offre payante complexe et difficilement maîtrisable. Un pas significatif est attendu sur la question des DRM ainsi que, pour le cinéma, la remise à plat de la chronologie des médias.
 
Points de consensus
 
La ministre de la Culture, qui a reçu Denis Olivennes le 13 novembre afin de faire le point sur le déroulement des travaux, a indiqué que les positions exposées lors des auditions « convergent vers plusieurs points importants de consensus » : tout d’abord la nécessité de mettre en œuvre un dispositif articulant avertissements personnalisés et sanctions proportionnées à la gravité des actes en cas de téléchargement illégal ; l’assouplissement au bénéfice des consommateurs des modalités de téléchargement légal, notamment la rapidité de mise à disposition des œuvres et l’interopérabilité des fichiers qui en sont le support ; enfin il s’agit de tirer parti des possibilités offertes par les technologies de marquage des œuvres et de filtrage. Christine Albanel a approuvé ces orientations et souhaité que les modalités de leur mise en œuvre puissent désormais faire l’objet d’un accord très rapide entre les parties prenantes. La ministre a assuré Denis Olivennes de l’attention particulière qu’elle porte à la dernière phase du processus de consultation, au cours de laquelle cet accord devrait être finalisé.
 
Dernière ligne droite
 
Une réunion était prévue, hier matin, 21 novembre rue de Valois, avec Christine Albanel et l’ensemble des personnalités rencontrées dans le cadre de cette mission. Denis Olivennes aurait à cette occasion déjà présenté ses conclusions, qu’il devrait exposer en fin de semaine au président de la République Nicolas Sarkozy. Ces conclusions seront vraisemblablement rendues publiques dans le courant de la semaine prochaine. Qu’en ressortira-t-il ? « N’attendez pas de miracle ! » avait prévenu Denis Olivennes dans une interview publiée le week-end dernier par Le Figaro Magazine. La mission s’est visiblement avérée plus difficile que ne le pressentait le PDG de la Fnac. « Je ne suis pas certain de parvenir à un consensus » confiait-il encore la semaine dernière dans Musique Info Hebdo, en indiquant qu’à défaut d’accord, il établirait une série de recommandations a minima.
 
Les mesures préconisées
 
Concernant l’offre légale, le rapport devrait préconiser deux mesures : une offre sans DRM pour la musique, notamment sur les chansons françaises, et la mise à disposition plus rapide des films en VOD (quatre mois contre sept mois et demi actuellement, pour aligner le délai sur celui des DVD). Côté répressif, le rapport préconise l’envoi de courriers électroniques d’avertissement puis, pour les récalcitrants, la suspension de leur abonnement à Internet (après plusieurs alertes restées sans effets), au moins pendant une courte période, mesure sur laquelle ont finalement cédé les FAI (mais qui pourrait se heurter à des obstacles juridiques). Tout cela piloté par une autorité indépendante, qui pourrait être l’Autorité de régulation des mesures techniques (ARMT). Ce dispositif devrait nécessiter des mesures législatives et des décrets. Au ministère de la Culture, on pense à les greffer sur un autre véhicule législatif plutôt que de pondre une loi spécifique. La piste des contraventions et celle du filtrage généralisé (finalement jugé très coûteux et facilement contournable) auraient été écartées. Reste à savoir comment détecter les infractions. Pour le Snep, favorable au filtrage en amont, prévoir des mécanismes d’avertissement et de sanctions sans se donner les moyens de détecter les contrevenants et d’en faire un usage massif, serait sans aucun effet sur le volume du téléchargement illégal. La fameuse feuille A4 promise par Denis Olivennes est décidemment très attendue. Mais la montagne pourrait accoucher d’une souris…
 
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