Le transfert de valeur, problématique prioritaire de la filière musicale
L’expression était sur toutes les lèvres et au centre de toutes les conférences de presse et prises de parole des organismes de la filière au Midem. Considérant que les grands acteurs d’Internet (Google, Apple, YouTube, Facebook et autres) se développent et tirent des revenus considérables (notamment par la publicité) de l’utilisation des contenus, elle dénonce un transfert de valeur qui leur est défavorable. Pour David El Sayegh, directeur général du Snep, « il est grand temps de se pencher sérieusement sur la problématique du transfert de valeur qui a lieu sur Internet, au détriment des industries culturelles et de la filière musicale en particulier, et au bénéfice des intermédiaires techniques au sens large », explique-t-il à Musique Info. « Un transfert massif de valeur s’est opéré depuis quinze ans entre ces deux mondes » constate également Jean-Noël Tronc, directeur général de la Sacem, en déplorant que des secteurs industriels « qui ne sont plus guère représentés en Europe que par des filiales de grands groupes américains et asiatiques » bénéficient d’une « asymétrie injustifiée de régulation ». Les producteurs indépendants sont la même ligne : « Le gouvernement a encouragé au cours des douze dernières années le développement du haut débit et des réseaux numériques, et cette volonté politique s’est accompagnée d’un sacrifice des industries de contenus qui ont largement subventionné les tuyaux » relève l’Ufpi.
Tous jugent urgent de corriger ce déséquilibre. Comment ? Pour Pascal Nègre, président d’Universal Music France, ce problème de transfert de valeur entre les producteurs de contenus et ceux qui en profitent ne peut être réglé par le droit d’auteur ou les droits voisins. La filière réclame à son tour une « taxe Google », s’engouffrant dans la brèche ouverte par l’accord signé par le géant d’internet avec les éditeurs de presse, mais pas sur les mêmes fondements. Pas sous forme de licence légal, en créant une nouvelle exception au droit d’auteur ou de nouveaux droits voisins, mais sous forme d'une « rémunération compensatoire », que le Snep justifie en se basant sur « l’enrichissement sans cause ». Ce principe juridique permet à une personne qui se sera acquittée sans raison d'une obligation, et qui se sera ainsi appauvrie, de demander à être remboursée par celui qui s'est enrichi à son détriment. Le Snep ne veut pas que le problème soit réglé de manière catégorielle mais attend que la ministre de la Culture se positionne pour le régler de manière transversale.