Le rapport Selles pointe la faiblesse et la dispersion des ressources
Le rapport Selles (137 pages) dresse, dans sa première partie, un état des lieux de la filière musicale et de l’impact de la crise, qui diffère selon les acteurs : ventes de musiques enregistrées divisés par deux entre 2002 et 2010 (et, par rebond, les investissements), 4 000 emplois perdus en dix ans, billetterie de spectacles en hausse de 60 % entre 2005 et 2009, recul de l’exposition de la musique dans les médias, déficit désormais structurel de la production locale, fragilité croissante du spectacle vivant (l’investissement de lancement et développement d’un artiste a plus que doublé en six ans), réduction des surfaces dédiées à la musique dans les magasins, marché du téléchargement dominé par un acteur étranger à la fiscalité avantageuse… La mission estime que « dans ce contexte, le modèle à « 360 degrés » apparaît comme une réponse possible à la crise du disque, en permettant une diversification des revenus et une mutualisation des pertes et des bénéfices ». Elle constate par ailleurs que la valeur de la musique se déplace vers l’extérieur de la filière (fournisseurs d’accès internet, plateformes de vidéo en ligne, ventes de terminaux).
Dans ce marasme, le rapport pointe l’efficacité limitée des dispositifs de soutien existants, l’insuffisance des ressources et l’émiettement des guichets. La majeure partie des aides directes repose sur des mécanismes de redistribution interne à la filière. L’action artistique et culturelle des sociétés de perception et de répartition de droits se monte à 50 M€ en 2010, tandis que le CNV a accordé 22 M€. Les aides publiques restent, elles, « globalement limitées » : crédit d’impôt, IFCIC, Fisac, Carte Musique qui « ne semble pas encore rencontrer le succès escompté »… Par ailleurs, l’Etat et les SPRD cofinancent divers organismes de soutien et d’accompagnement : Bureau Export, Studio des Variétés, Fair, Irma…
La faiblesse des ressources financières est aggravée par la dispersion des organismes, note le rapport, en soulignant que la filière musicale est moins aidée que d’autres secteurs. Elle bénéficie de moins de 80 M€, dont 73 M€ d’aides directes essentiellement financées par des mécanismes de redistribution interne. Un montant jugé « très faible au regard de la consommation de musique (musique enregistrée et spectacle vivant) qui représente en 2010 une dépense totale de 1,448 milliard d’euros TTC, et des aides dont bénéficient les autres secteurs (297 M€ d’aides directes pour l’industrie cinématographique).
La mission met aussi en avant la dispersion des guichets d’aide (« un maquis au sein duquel il est parfois difficile de s’orienter »), dont les critères d’attribution ne sont pas harmonisés et pas toujours clairement définis. Une situation qui « ne concourt pas à l’émergence d’une politique de soutien ciblée et raisonnée, fondée sur des priorités claires et des données objectives », sans parler des relations financières croisées entre les sociétés civiles, l’Etat et les organismes de mutualisation, qui ne contribuent pas à la lisibilité de l’ensemble et génèrent des frais de gestion supplémentaires (budget cumulé de 10 M€ et 118 agents au total).