Qui veut la peau des cercles vertueux ? s'interroge l'Adami
Qui veut la peau des cercles vertueux ? C’était le thème volontiers provocateur de l’un des ateliers proposés lors des Rencontres européennes de l’Adami qui se sont tenues les 6 et 7 décembre à Cabourg. Parmi ces cercles vertueux - les divers mécanismes et dispositifs dont la France est championne toutes catégories -, c’est sans surprise la rémunération pour copie privée qui a focalisé une partie des débats, avec l’argument de son importance pour le financement de la création : les fameux 25 %. Pour autant, leur apport – 50 millions d’euros pour aider 5000 projets par an – est à relativiser, au vu des chiffres que Bruno Boutleux, directeur de l’Adami, met en perspective : les 4 milliards d’euros qu’y consacre le ministère de la culture, les 7 milliards de dépenses culturelles des collectivités locales et les 2 milliards apportés par le mécénat, alors l’ensemble des « cercles vertueux » (taxes sur le cinéma, la télévision et les spectacles, rémunération équitable, copie privée) ne totalisent que 1,57 milliard. « Les revenus de la rémunération équitable et de la copie privée gérés par l’Adami représentent entre 5 % et 10 % des revenus des artistes » indique Bruno Boutleux. « C’est à la fois beaucoup et peu pour la majorité de la classe moyenne des artistes » Bernard Hegger, délégué général du Simavelec, qui jouait le mauvais rôle de la pièce face aux ayants droit, a assuré que les industriels étaient favorables la copie privée « mais au juste prix », en soulignant que celle-ci n’était « pas un couteau suisse » et en dénonçant « ceux qui tirent la ficelle trop fort ».
Quant aux problématiques Internet, Google n’en a pas la même perception que les ayants droit. « Internet est un formidable outil pour la diversité et le foisonnement culturel. Ca n’exonère pas la question du financement de la culture, Mais notre conviction, c’est qu’il n’y a pas de solution miracle. Il faut tester, innover et encore innover, ça prend du temps » a déclaré Alexandre Laferrière, directrice des relations institutionnelles de Google France, en se gardant bien de répondre sur les questions soulevées, comme celle de la contribution de l’opérateur au financement des contenus qu’il utilise et qui lui permettent de réaliser son chiffre d’affaires. Elle préfère évoquer « des modèles à trouver ensemble, sur un mode de partenariat gagnant-gagnant », comme le préfinancement mis en place sur You Tube, où « Google partage le risque avec les créateurs », via une avance de recettes sur les revenus publicitaires. Hervé Rony, directeur général de la Scam (après avoir été celui du Snep pendant 15 ans), reconnaît la volonté de dialogue de Google et ne veut pas le diaboliser à outrance mais se demande si le géant américain « va jouer le jeu de la régulation sur Internet ? ». Bruno Boutleux dénonce un rapport de force permanent (« On transige quand on ne peut plus faire autrement mais dans conditions nettement moins avantageuses que s’ils avaient, dès le départ, négocié avec les titulaires de droits ») et réaffirme que la gestion collective (« un vrai mode de régulation » !) est la solution.
Mais il reste encore du chemin à parcourir et des confusions à dissiper. 27 ans après la mise en place de la rémunération copie privée, il y a encore des artistes-interprètes (nous en avons eu l’exemple à Cabourg) qui considèrent la copie privée comme « un droit à rémunération pour les utilisations secondaires », et non pas comme la compensation d’un préjudice. Enfin, interrogés sur la perspective d’une réforme ou adaptation du dispositif, les ayants droit se sont montrés moins réticents que ces dernières semaines. Au début du débat, le directeur général de l’Adami avait d’ailleurs présenté les cercles vertueux, comme « ceux de l’ancien monde, qui doivent être adaptés ». Il considère que le rôle de l’Etat est de réguler, d’entretenir et de développer, « parce qu’il en reste d’autres à inventer ».