Muzik 2025 : un aperçu des prédictions...
L’ensemble des scénarii qui ont contribué au colloque « Muzik 2025 » est téléchargeable sur le site du MaMA au lien suivant :
http://www.mama-event.com/wmedias/conferences/MAMA10_MUZIK_2025_SCENARIO_FR.pdf
« Nous devons faire en sorte que les enregistrements sonores cessent d’être la force dominante dans l’industrie de la musique. Si l’on arrive à assurer cette transition, cela signifierait que l’artiste serait enfin capable de se déplacer d’une extrémité de la « chaîne de valeur » au cœur d’un écosystème. Cet écosystème serait peuplé de toutes sortes de services professionnels variés permettant aux artistes d’atteindre leur public. Quelques groupes en sont déjà les pionniers, et ont des systèmes en place qui peuvent nous servir d’exemples - Radiohead, Metric, et Marillion sont des groupes parmi d’autres qui ont choisi d’avoir le dernier mot sur la façon dont ils communiquent avec leurs fans ».
Matthew Brown
« En 2025, les concerts dans les stades n’existeront plus. Economiquement et esthétiquement, ils seront considérés depuis longtemps comme inutiles (…). En 2025, il n’y aura plus de magasins de disques, comme il n’y aura plus de maisons de disques d’ailleurs. Il y aura des chansons, des albums mais ils ne seront plus financés, publiés, promus ou distribués sous forme physique par des sociétés sur le modèle de EMI, Universal, etc. (…) La campagne conjointe de la Fédération des Managers de Musique (Music Managers Forum) et la Coalition des Artistes Vedettes (Featured Artists Coalition) a transformé la structure du pouvoir des sociétés de gestion collective. Aujourd’hui, la profession a dû accepter ce qui ne l’avait jamais été avant : la musique ne peut plus être considérée comme un bien. Il s’agit plutôt d’un service (comme elle l’avait toujours été), pour lesquels les musiciens ont été payés au moment de la livraison (la campagne pour l’extension des droits d’auteur a été enfin abandonnée). Un nouveau type de grandes sociétés de musique a émergé, non plus fondé sur la propriété des droits mais sur les packages de services (…) ».
Simon Frith
« Pour les nouvelles générations, la musique n'est déjà plus un objet qui s'acquière. C'est une expérience. C'est un service. C'est gratuit. C'est quelque chose qui se partage. C'est pourquoi la lutte du téléchargement gratuit est perdue, la musique étant l'un des modes favoris d'interactivité sociale. L'un des scénarios envisageable serait la mise en place d'une licence globale qui permettrait de télécharger la musique de façon illimitée pour quelques euros, avec une répartition juste des bénéfices entre musiciens et intermédiaires. La musique ne pourra jamais être intégralement gratuite, mais l'hypothèse d'une perception et d'une redistribution justes et directes, éliminant les marges des intermédiaires, n'a jamais été aussi forte ».
Victor Belanciano
« Cela fait à présent dix ans que la dernière des quatre majors a été absorbée par le portail chinois Baidu pour un yuan symbolique. Il faut l'avouer, Baidu était plus intéressé par le fait de récupérer une marque qui fut longtemps prestigieuse que par les contenus qu'elle détenait. Ses trois consœurs majors avaient été démantelées quelques années auparavant, au profil de grands groupes de l'internet, mais aussi de maisons de disques nouvelle génération (…). Nombreux sont d'ailleurs ceux qui font le parallèle entre la chute des grandes maisons de disques avec celle des maréchaux-ferrants, du début du XIXème siècle : deux industries qui ont brillé par leurs incapacité à comprendre qu'une rupture majeure nécessite un changement de modèle majeur, plutôt que de nombreuses adaptations progressives (…). Les plus grandes stars planétaires sont redevenues des compositeurs, comme au 19ème siècle. Les interprétations sont laissées à la communauté des co-créateurs, l'artiste se contentant d'orchestrer le mouvement de création. Les titres ne cessant d'évoluer, au gré du talent de la communauté et de l'appréciation - et du feed-back - personnalisée que font chacun des auditeurs, devenus de fait des compositeurs. Ainsi la règle du co-marketing, qui avait prévalue 30 ans durant du 1/10/100 (1% de méta-créateurs, 10% d'acteurs très proactifs et 100% d'internautes passifs est devenue 0,1% de méta-initiateurs et 100% de participants interagissant sans même parfois en faire l'effort, grâce à de subtils capteurs ».
Gilles Babinet