Les 22 propositions du rapport Zelnik
Proposition n° 1
Mise en place d’une carte « Musique en ligne » pour les internautes de 15 à 24 ans. D’une valeur faciale de 50 euros, elle ne coûterait que 20 à 25 euros à l’internaute, la différence étant prise en charge par l’Etat et par les professionnels. Cette mesure temporaire de « stimulation de la demande » permettrait d’injecter 60 millions d’euros dans l’achat de musique en ligne et « pourrait faciliter le décollage du marché tant attendu ».
Proposition n° 2
Création d’un portail de référencement des œuvres musicales en ligne. Subventionné par les pouvoirs publics (soit par la création d’un groupement, soit par l’intermédiaire d’un appel à projets), ce portail permettrait aux internautes de trouver la musique qu’ils cherchent et d’y accéder selon le service de leur choix, avec neutralité et promotion de la diversité des offres.
Proposition n° 3
Lancement d’une campagne de communication ambitieuse visant à promouvoir les services en ligne légaux auprès du grand public et plus particulièrement des jeunes de moins de 25 ans. D’un coût total estimé à 5 millions d’euros, elle pourrait faire l’objet d’une commande des pouvoirs publics par l’intermédiaire du Service d’Information du Gouvernement.
Proposition n° 4
Extension du régime de la rémunération équitable aux services de diffusion en ligne (webcasting), considérant qu’ils ont un pouvoir prescripteur crucial et peuvent devenir un instrument de marketing et de recommandation utile à l’ensemble de la filière. En contrepartie, les services concernés pourraient être soumis à des obligations comparables à celles des radios hertziennes en termes de diversité culturelle.
Proposition n° 5
Mise en place d’un régime de gestion collective sous une forme volontaire, pour le téléchargement de titres et la lecture en continu à la demande. Si les professionnels concernés (producteurs, artistes-interprètes), appelés à se réunir et à opter pour un tel régime dans les meilleurs délais, n’étaient pas parvenu à un accord d’ici la fin 2010, les pouvoirs publics pourraient instaurer par la loi un régime de gestion collective obligatoire des droits exclusifs.
Proposition n° 6
En contrepartie de la mesure précédente, revalorisation de la rémunération équitable, désormais étendue à la diffusion sur internet, au profit des ayant-droits ; instauration de mécanismes de garanties permettant aux ayant-droits de retracer les revenus tirés de la distribution ou diffusion sur internet et d’assurer la rapidité de leur répartition ; garantie de la diversité des contenus et des offres éditoriales. « Pour imposer sa légitimité, y compris aux yeux des acteurs étrangers, la gestion collective doit en effet devenir plus réactive, plus efficace et plus rémunératrice, et ce au profit de l’ensemble des ayant-droits. Les pouvoirs publics devront par ailleurs être en mesure de s’assurer du caractère soutenable, pour les éditeurs de services musicaux, des barèmes négociés par les différentes sociétés de perception et de répartition des droits.
Proposition n° 7
Reconduction et amélioration du crédit d’impôt pour la production d’œuvres phonographiques. Ajustements proposés :
- Le rendre plus favorable aux entreprises bénéficiaires en augmentant de dix points le taux du crédit d’impôt pour l’ensemble des entreprises (de 20 à 30%), en relevant le plafond par entreprise et par exercice à 3 millions d’euros et en supprimant la clause de progression de 25% d’œuvres éligibles l’année suivante.
- Intégrer à l’assiette des dépenses prises en compte celles effectuées au profit d’associations ou de groupements d’intérêt économique ayant pour objet la mutualisation de certaines activités d’intérêt interprofessionnel : négociation collective pour compte de tiers, distribution en gros, structuration et maintenance de bases de métadonnées musicales. Les entités concernées devraient faire l’objet d’un agrément par le ministère chargé de la culture et de la communication pour que les dépenses à leur profit – prises de participation ou cotisations par exemple – donnent lieu à l’avantage fiscal.
- Élargir également l’assiette des dépenses prises en compte aux dépenses de marketing et de promotion engagées par les producteurs au profit des nouveaux talents, dépenses cruciales pour le développement du marché numérique.
Proposition n° 8
Renforcement des moyens d’intervention de l’Institut pour le financement du cinéma et des industries culturelles (IFCIC) d’environ 10 millions d’euros au profit des entreprises du marché numérique de la musique.
- Création d’un fonds d’avance au sein de l’IFCIC avec pour objet exclusif le financement d’investissements dans le développement de services musicaux en ligne. Doté de 7 millions d’euros et fonctionnant selon les mêmes règles que l’actuel Fonds d’avance aux industries musicales (FAIM), il octroierait ses avances sur des durées suffisamment longues (cinq ans, voire davantage) pour qu’elles soient compatibles avec la progressivité de la montée en régime des modèles de rémunération des services musicaux en ligne.
- Mise en place d’un fonds de garantie additionnel afin d’être en mesure d’offrir systématiquement et sans plafond un taux de garantie de 70% au financement de projets d’édition de services musicaux innovants en ligne. Il s’agirait d’apporter une garantie supplémentaire, de 20 à 30% du crédit, en sus des 40 à 50% déjà offerts par les fonds existants de l’IFCIC. Une dotation de 3 millions d’euros permettrait de garantir dans le secteur de la musique 33 millions d’euros de nouveaux crédits exclusivement destinés au développement de services musicaux sur internet par des entreprises indépendantes.
- Afin de répondre au mieux aux besoins des sociétés concernées, la répartition de l’enveloppe globale entre fonds de garantie et fonds d’avances remboursables pourrait être réajustée périodiquement.
Proposition n° 9
Mobilisation des acteurs publics compétents pour développer les apports en fonds propres aux jeunes entreprises de croissance dans le secteur des services musicaux en ligne. Le Fonds stratégique d’investissement (FSI), adossé à la Caisse des dépôts et consignations, a récemment ouvert la voie en prenant une participation dans la société DailyMotion. Les apports publics en fonds propres dans les services musicaux en ligne pourraient à l’avenir se développer sur ce modèle.
Proposition n° 10
Etendre progressivement le prix unique au livre numérique et défendre le passage au taux réduit de TVA.
- A court terme, adopter une loi reprenant les principes fixés, pour le livre physique, par la loi sur le prix unique de 1981 en les adaptant aux spécificités des livres numériques homothétiques (copie numérique du livre papier).
- A moyen terme, préparer une loi générale sur le livre numérique permettant de renforcer la maîtrise des éditeurs sur le prix de vente, en tenant compte des évolutions du marché, des effets de l’instauration d’un prix unique pour les livres homothétiques et de l’avis que doit rendre prochainement l’Autorité de la concurrence sur le décret d’exemption et les contrats de mandat.
Proposition n° 11
Constitution d’une plateforme unique accessible aux libraires, où chaque éditeur puisse déposer son offre à l’intention des libraires, dans une logique de groupement d’intérêt économique – sur le modèle de Prisme pour le transport, Dilicom pour les commandes ou Électre pour les données. Il s’agirait de développer une plateforme centrale, interopérable avec les centres de stockage, de distribution des fichiers des éditeurs, mutualisée et rendant une offre numérique exhaustive accessible aux libraires.
Proposition n° 12
Renforcement des moyens publics affectés au CNL
- Triplement des moyens affectés par le CNL à l’aide à la numérisation des livres, lesquels passeraient de 1,5 million à 4,5 millions d’euros d’ici 2011.
- Elargissement de l’assiette de la redevance sur la vente de matériel de reproduction et d’impression aux consommables ‘(cartouches jets d’encre ou toners laser).
- Augmentation du taux maximum de participation de l’Etat à 70 ou 80 %
- Réévaluation du plafond d’aide (actuellement fixé à 1 euro par page et extension du périmètre de cette aide à certains coûts indirects (notamment la recherche).
Proposition n° 13
Assouplissement de la chronologie des médias pour mettre le développement de l’offre de cinéma et de vidéo à la demande
- Permettre l’exploitation de films par les services de vidéo à la demande dès la fermeture de la fenêtre des 22 à 24 mois après la sortie en salle, voire dès le 10e mois.
- Faciliter l’expérimentation du développement des services gratuits de vidéo à la demande, sans attendre le délai de 48 mois actuellement prévu, notamment pour les films n’ayant bénéficié d’aucun financement par une chaîne de télévision.
- Ménager la possibilité de pratiquer certaines expérimentations limités et rigoureusement évaluées dans toutes les fenêtres d’exploitation., afin de pouvoir innover et mieux répondre aux usages sur le marché numérique.
Proposition n° 14
Fixer pour les services de vidéo à la demande des principes d’accès non discriminatoires aux réseaux de distribution, sous le contrôle du CSA, afin d’amener les fournisseurs d’accès à élargir leur offre de films en VOD. Des dispositions législatives pourraient être intégrées dans une loi relative au développement des services culturels en ligne,
Proposition n° 15
Instaurer une redevance sur l’exploitation commerciale des films tombés dans le domaine public. Elle permettrait d’abonder de façon pérenne un fonds spécial, qui serait géré par le CNC pour la numérisation des films de patrimoine relevant du domaine public.
Proposition n° 16
Saisir pour avis l’Autorité de la concurrence sur la situation du marché publicitaire en ligne.
Celle-ci pourrait se prononcer sur le rôle que les dysfonctionnements concurrentiels des marchés jouent dans la crise actuelle des éditeurs de services culturels et de presse en ligne et pourrait, le cas échéant, suggérer des remèdes.
Proposition n° 17
Création d’un prélèvement obligatoire sur les revenus publicitaires en ligne. Cette taxe prendrait pour assiette les revenus publicitaires en ligne des sociétés établies dans l’Union européenne, générés par l’utilisation de leurs services en ligne depuis la France.
Proposition n° 18
Revoir à la baisse la proportion de taux réduit de TVA appliqué aux offres combinées ADSL des opérateurs de télécommunications incluant abonnement téléphonique, accès à Internet et télévision.
Proposition n° 19
Agit pour obtenir l’application du taux réduit de TVA à tous les services culturels en ligne, en commençant par soutenir l’initiative espagnole sur le livre numérique. La mission préconise que la France replace la baisse de la TVA pour l’ensemble des produits culturels en ligne au sommet de ses priorités dans le domaine fiscal, en gardant à l’esprit que, à l’exception du livre, l’horizon temporal réaliste est 2015.
Proposition n° 20
Défendre auprès des instances communautaires le caractère propre du droit d’auteur et des droits voisins et mettre en place un système adapté de licences européennes. « En ce qui concerne les droits des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique, de récentes décisions de la commission entrainent la confusion et interdisent aux sociétés de gestion collective, telles que la Sacem, d’accorder des licences pour l’édition de services musicaux en ligne en dehors de leur territoire national. De surcroît, les éditeurs du répertoire anglo-américain s’efforcent de contourner les sociétés nationales de gestion collective et de négocier directement avec les services musicaux en ligne des licences dites « pan-européennes » note la mission qui considère que « cette situation, ubuesque, doit prendre fin ». Elle préconise que la France prenne, avec la nouvelle Commission, l’initiative d’un système adapté de licences européennes, « à défaut de revenir aux accords de Santiago dont l’application donnait pourtant toute satisfaction ».
Proposition n° 21
Définir et mettre en œuvre avec nos partenaires une stratégie européenne de la numérisation dans ses rapports avec la culture.
La mission Zelnik pointe la situation de quasi monopole de Google. Considérant que sa position dominante sur le plan technologique et commercial a entraîné une concentration des revenus, en particulier ceux de la publicité en ligne, qu’elle entraîne un déséquilibre dans le partage de la valeur et constitue une menace directe pour la diversité culturelle, elle appelle la France a établir une alliance avec les autres membres de l’Union européenne pour que soit définie et mise en œuvre une stratégie européenne de la numérisation dans ses rapports avec la culture. « Ce doit être une priorité de la nouvelle Commission » estime la mission.
Proposition n° 22
Mise en place à Bruxelles d’une plateforme européenne de la création sur Internet. « La coopération entre toutes les parties prenantes est la seule voie efficace pour assurer les équilibres indispensables à la culture dans l’environnement numérique » explique la mission. Cette plateforme regrouperait « des représentants de toutes les entreprises et professions intéressées qui apporteraient par ce biais leur expertise de manière permanente et régulière au collège des commissaires et aux directions générales de la Commission ».