La mise en œuvre de la « Carte Musique » prévue pour le 21 juin
La « Carte Musique », mesure préconisée par la commission Zelnik pour inciter les 12-24 ans à recourir aux plateformes de téléchargement légal, se met en place. La Direction générale des médias et des industries culturelles a fixé son lancement pour la Fête de la Musique, soit le 21 juin. Le président de la République – qui y voit une façon de « réhabituer les jeunes à acheter ce qu’ils écoutent » – avait, en début d’année, avancé le chiffre de 200 euros de valeur faciale, dont la moitié effectivement payée par le consommateur. Finalement, cette carte prépayée sera limitée à 50 € par an, dont 25 € pris en charge en partie par le gouvernement.
L’internaute concerné (les 12-24 ans constituent une population potentielle de 10,5 millions de personnes) devra s’inscrire sur le portail web qui sera dédié à l’opération, fournir ses données personnelles (nom, coordonnées, date et lieu de naissance), choisir le(s) service(s) de téléchargement qu’il souhaite utiliser et créditer son compte pour recevoir (par mail ou SMS) un code promotionnel à utiliser sur la plateforme choisie. Le crédit de la carte (50 €) pourra être utilisé en une ou plusieurs fois dans le délai d’un an, à raison d’une carte par personne.
Avis partagés sur l’impact de la mesure
Les avis sont partagés sur l’impact de l’opération, dont il est prévu qu’elle soit reconduite pendant trois ans. L’appel d’offres lancé par le ministère de la Culture demandait aux prestataires de prévoir un système permettant de stopper la délivrance des cartes une fois atteint le budget annuel alloué par l’Etat (le rapport Zelnik préconisait 25 M€ de mise de départ), l’opération pourrait s’arrêter là. Soit, à raison de 25€ par carte, 1 million de jeunes concernés, représentant une consommation de musique supplémentaire de 50 millions d’euros. Une manne bien maigre dans un marché de la musique enregistré qui a pesé 894.7 millions d’euros (prix détail TTC annoncé par le Snep) en 2009. Mais il pourrait au moins permettre potentiellement de doubler le marché du téléchargement (61.4 M€ valeur détail TTC l’an dernier).
« C’est une mesure qui n’aura aucun effet réel ni sur le marché ni sur les comportements et qui, une fois de plus, fait perdurer un système de subventionnement de l’industrie culturelle par le contribuable » réagit l’UFC Que Choisir qui, invitée en mars à l’une des premières réunions sur le dispositif, avait décliné. « Nous ne voulons pas d’un marché sous perfusion » se défend David El Sayegh, directeur général du Snep. « L’action sera limitée dans le temps et une fois que les consommateurs auront testé les plateformes, ils se rendront compte de la qualité des offres ». De la qualité oui, mais du prix aussi, le challenge étant d’inciter une population à payer ce qu’elle consomme gratuitement (le nombre de titres téléchargés illégalement serait de 20 fois supérieur à celui des titres acquis légalement selon le ministère de la Culture).
Les FAI pourraient être mis à contribution
Diverses voix, notamment dans la classe politique, se sont par ailleurs élevées pour critiquer l’intervention de l’Etat, donc du contribuable, estimant que d’autres secteurs étaient autrement plus prioritaires (santé, emploi, etc.) que la musique, en période de crise. Redoutant le succès du dispositif Carte Musique, et voulant limiter les dégâts sur les finances publiques, le gouvernement envisage maintenant de solliciter les fournisseurs d’accès à Internet.
Le président de la République émet l’idée d’augmenter l’assiette de la part de la TVA à 19,6 % qui porte actuellement sur 50 % de leur chiffre d’affaires pour la porter à 55 %. Cette modification, qui rapporterait à l'Etat entre 60 et 80 millions d’euros par an, pourrait faire l’objet d’un amendement présenté lors de la loi de finances rectificative que les parlementaires étudieront en juin.
Inutile de préciser que les FAI, déjà mis à contribution dans le financement de France Télévision depuis l’arrêt de la publicité après 20h (objet d’un recours à Bruxelles) et qui pourraient voir la taxe Cosip élargie à l'ensemble de leur chiffre d'affaires (et non la moitié) afin de financer la fiction française, ne sont guère enthousiastes… Pour rappel, l’idée d’une contribution des FAI à la filière musicale, notamment réclamée par la Sacem, l’Adami et MMF, avait été écartée des préconisations de la commission Zelnik.