FOCUS : Les chiffres de la diffusion du spectacle vivant en 2011
Le CNV vient de publier sa 7ème édition des « chiffres de la diffusion » des spectacles de musiques actuelles et de variétés, ainsi que ses statistiques sur les entreprises de spectacles et leur évolution. A périmètre constant de perception, le nombre de déclarants a progressé de 13 %, celui des représentations de 5 % et le nombre de spectateurs approche les deux millions, note le CNV en annonçant une hausse de l’assiette de 4 % et des recettes de billetterie de 635 M€ (entrées payantes), auxquelles s’ajoutent 14,5 M€ de contrats de cession pour les représentations gratuites.
Chiffres clés 2011 | Total | Entrées payantes | Entrées gratuites |
Nb déclarants | 3 347 | 3 056 | 623 |
Nb représentations | 50 868 | 43 693 | 7 175 |
Nombre d’entrées | 21 712 790 | 19 979 888 | 1 732 902 |
Recettes | 649 645 513 € | 635 098 971 € | 14 547 541 € |
Mais si les indicateurs semblent au vert, « il convient d’être nuancé » insiste Jacques Renard. Les chiffres à la hausse cachent de fortes disparités et s’expliquent en partie par l’augmentation du nombre des déclarants de la taxe sur les spectacles, explique le directeur du CNV. L’audience large ou confortable que connaissent certains spectacles, festivals ou entreprises ne saurait occulter les difficultés grandissantes de nombreuses petites et moyennes structures, davantage portées vers l‘émergence et l’innovation artistique. D’autant que les grosses productions, bien que restant significatives, ont connu en 2011 une fréquentation moins importante dans des jauges plus faibles.
43 % des PME en déficit
On relèvera au passage la concentration du secteur. Parmi les 3 347 organisateurs déclarants, 50 (soit 1,5 % d’entre eux) concentrent 64 % des recettes pour seulement 13 % du nombre total de représentations. Les dix premiers déclarants comptent pour 33 % de l’assiette et 4 % seulement du nombre de représentations. La concentration s’exprime plus encore pour les représentations gratuites : les 50 premiers déclarants concentrent 68 % du nombre de représentations et 69 % de l’assiette. Au total, 6 % des structures concentrent 61% du chiffre d’affaires et les 10 premiers déclarants de la taxe (sur plus de 3 000 déclarants) réalisent un tiers de la billetterie. « Le processus d’intégration verticale est par ailleurs réel, mais il n’existe pas à ce jour d’instruments législatifs permettant de lutter contre, si ce n’est le droit de la concurrence, qui n’est pas suffisant. Il existe une législation spécifique pour le cinéma, pour la presse et de l’audiovisuel, peut être convient-il d’en imaginer une pour le domaine du spectacle vivant » déclarait récemment Jacques Renard à l’Irma. Certes, le chiffre d’affaires global du secteur a augmenté de 14% entre 2008 et 2010, mais celui des petites et moyennes structures est en recul, avec une baisse du taux de rentabilité commercial. Pas moins de 43 % des entreprises affichent un résultat d’exploitation négatif, ce qui est énorme. « Cela montre bien la fragilité intrinsèque du secteur du spectacle vivant, qui rejoint le phénomène de précarisation des artistes » souligne Jacques Renard.
Diversité des lieux
Plus de 6 000 lieux différents de représentation ont été déclarés en 2011. 38 % des représentations se sont déroulées dans des salles spécialisées musiques actuelles. Concentration là aussi : les 10 premiers lieux de diffusion comptent pour 30 % du total de l’assiette pour 3 % du nombre de représentations. Les seuls Zénith (17 en 2011), pris en compte dans la catégorie salles spécialisées musiques actuelles, ils pèsent 2 % des représentations, 12 % de la fréquentation totale et 16 % des recettes de billetterie. Dans le contexte actuel, les festivals tirent mieux leur épingle du jeu, comptent pour 20 % de la fréquentation totale et 16 % des recettes de billetterie et contrats de cession. Ils représentent 11 % des représentations payantes, mais « ces estimations restent vraisemblablement sous-évaluées », en raison de la comptabilisation par nombre de jours plutôt que par nombre effectif de représentations.
Typologie des lieux | Nb représ. | Assiette | Repr. payantes | Billetterie |
Salles musiques actuelles | 38 % | 40 % | 43 % | 41 % |
Salles spécialisée autres | 10 % | 5 % | 12 % | 5 % |
Salles pluridisciplinaires | 19 % | 9 % | 22 % | 10 % |
Parcs expo, palais congrès... | 3 % | 10 % | 3 % | 10 % |
Equipement polyvalent | 12 % | 22 % | 10 % | 22 % |
Etablissements de loisirs | 6 % | 3 % | 5 % | 3 % |
Autres | 3 % | 0 % | 1 % | 0 % |
Chapiteaux, tentes… | 1 % | 1 % | 1 % | 1 % |
Plein air | 7 % | 9 % | 2 % | 8 % |
Répartition des lieux en fonction de la jauge maximale déclarée* |
De 1 à 100 8 % |
De 101 à 250 19 % |
De 251 à 500 29 % |
De 501 à 1 000 21 % |
De 1 001 à 1 500 11 % |
De 1 501 à 3 000 4 % |
Plus de 3 000 5 % |
Non renseigné 3 % |
(*) Pour les 334 lieux déclarés par les structures ayant une activité principale de spectacle de variétés.
Le CNV note l’absence de fortes locomotives sur la route l’an dernier, par rapport à 2010. Les grosses productions (grandes tournées et représentations événementielles) ont réuni un public moins important dans des jauges plus faibles. Les dates françaises de tournées internationales étant réduites en 2011, les recettes de billetterie qu’elles cumulent ont été divisées par deux depuis 2010 (- 14 millions d’euros), tout en restant importantes « notamment du fait de prix moyens proposés élevés (supérieurs à 60 euros). La bonne tenue de 13 spectacles d’artistes français de chanson et pop-rock (Yannick Noah, Eddy Mitchell, Charles Aznavour, Michel Sardou, Jean-Louis Aubert, Age Tendre et Têtes de Bois, les Enfoirés) d’humour (Florence Foresti, Jamel Debbouze, Laurent Gerra), les comédies musicales (Mozart l’Opéra Rock et Dracula) et les spectacles sur glace (Holiday On Ice, Disney sur Glace), ont généré au total 9,9 millions d’euros de recettes supplémentaires mais sans compenser ce déficit. Les spectacles atteignant individuellement de 1 à 5 M€ de recettes dans l’année ont progressé de 6 %, ceux situés entre 500 000 € et 1 million ont grimpé de 31 %. « Ce sont donc des spectacles présentés dans des jauges plus réduites qui ont eu tendance à rencontrer un plus grand succès » observe le CNV.
Concentration aussi des chiffres d’affaires
Globalement, les entreprises du secteur ont sont relativement jeunes : 48 % d’entre elles ont moins de dix ans. L’ensemble des structures étudiées détient au moins une licence. C’est principalement la licence 2 (responsabilité d’un spectacle dont celle d’employeur du plateau artistique) à 89 %, suivi de la licence 1 (diffuseurs, responsables de l’accueil du public, de la billetterie et de la sécurité) pour 76 % de l’échantillon, tandis que 32 % détiennent une licence 1 (lieux de spectacles). Un tiers des structures sont donc des exploitants de salle – dont 29 % avec production et/ou diffusion (lieux diffusant des spectacles assumant la prise de risque de billetterie et pouvant être en situation d’employeur du plateau artistique). Les organisateurs de festivals représentent quant à eux 17 % de l’ensemble des structures et 21 % des entreprises de spectacle de variétés.
Typologie des structures |
Exploitants de salle avec production et/ou diffusion 29 % |
Exploitants de salle sans production/diffusion 3 % |
Organisateurs de festivals 17 % |
Producteurs nationaux/entrepreneurs de tournées 27 % |
Producteurs / Diffuseurs / Promoteurs locaux 16 % |
Compagnies / Collectifs d’artistes 8 % |
Les entreprises commerciales constituent 77 % de l’assiette déclarée et 46 % du nombre de représentations, contre respectivement 16 % et 41 % pour les associations, pourtant nombreuses (54 % du total des déclarants en 2011). Le secteur public (collectivités territoriales, groupements, établissements publics, SEM, régies) compte, lui, pour 6 % de l’assiette et pour 12 % du nombre de représentations. En termes de chiffres d’affaires, la concentration y est également éloquente. 207 entreprises réalisent 87 % du total tandis que 653 se partagent les 13 % restant.
Répartition du chiffre d’affaires des entreprises |
Inférieur à 100 000 € 249 structures 1% |
De 100 000 à 250 000 € 195 structures 3% |
De 250 000 à 500 000 € 112 structures 3% |
De 500 000 à 1 M€ 97 structures 6 % |
De 1 à 5 M€ 157 structures 26 % |
Supérieur à 5 M€ 50 structures 61 % |
Un état des lieux mitigé donc au vu des chiffres publiés que le CNV analyse avec prudence. « Nous poursuivons notre veille de la préservation des équilibres et notre réflexion sur les effets de concentration » souligne Jacques Renard, en convenant que « la crise finit par nous rattraper ».Quant au montant des perceptions de taxe fiscale attendu pour 2012, le CNV table sur 23 M€. « Si tout va bien, nous serons à ce niveau. On enregistre un petit retard fin août mais qui sera peut-être compensé en septembre car nous n’avons pas encore les retours de tous les festivals » indique Jacques Renard.
L’organisme estime globalement le chiffre d’affaires H.T. des entreprises du spectacle à 1,2 milliard d’euros en 2010 (soit beaucoup plus que les seules activités marchandes de spectacle vivant), et le total de leurs produits d’exploitation à 1,36 milliard. En termes d’enjeux économiques, la scène a bien dépassé le secteur musique enregistrée qui affichait un chiffre d’affaires de 642 M€ en 2010.