FOCUS : le baromètre de l’édition musicale 2010/2011
Les deux chambres syndicales de l’édition musicales, la CSDEM (éditeurs de musique de variété) et la CEMF (éditeurs de musique classique) viennent de publier le nouveau baromètre du secteur, qui porte sur les années 2010/2011. Réalisé avec le concours technique du cabinet d’audit KMPG, il a pour objectif d’apporter un éclairage périodique sur l’état du marché de l’édition et de son évolution « dans un contexte actuel difficile pour l’industrie de la musique dans son ensemble ». Ces indicateurs économiques et financiers sont aussi développés afin que la profession d’éditeur soit « reconnue comme un acteur industriel incontesté ». L’étude repose sur les informations déclaratives fournies par 110 sociétés d’édition, sur la base d’une liste établie par la CSDEM et la CEMF. A défaut d’être exhaustif, l’échantillon n’en demeure pas moins représentatif (les majors y ont participé) et permet de dégager des tendances significatives malgré des réalités disparates. Sont tour à tour abordés : les caractéristiques générales et les principales données de gestion du secteur, ses caractéristiques financières, ses investissements, ses financements, ses ressources humaines et ses préoccupations.
2010 2011 Evol.
Nombre d’œuvres au catalogue 6 090 417 6 971 059 + 14 %
Part des indépendants 31 % 37 %
Nombre d’œuvres locales 350 016 368 871 + 3 %
Part du local dans le catalogue total 6 % 5 %
Pactes de préférence en cours 737 790 + 7 %
Nouveaux pactes signés 158 127 - 20 %
Contrats de cession d’œuvres locales 4 679 5 514 + 18 %
Part des nouveaux talents 55 % 47 %
L’étude pointe une progression à deux chiffres du nombre d’œuvres en catalogue (+ 14 %), mais qui masque une fragilisation du répertoire local, en diminution de 10 %. Pas moins de 5 514 nouveaux contrats de cession d’œuvres locales ont été signés en 2011, soit 18 % de plus qu’en 2010. Au sein de ce chiffre, le nombre de contrats signés avec des nouveaux talents reste stable (+ 1%) et leur part baisse par conséquent de 17 %, ne représentant plus que 47 % du total, contre 55 % en 2010.
2010 2011 Evol.
Chiffre d’affaires de l’échantillon 189 M€ 196 M€ + 3,6 %
Dont droitsSacem/SDRM (64 %) 123 M€ 126 M€ + 2 %
- dont droits d’exécution publique 73 M€ 78 M€ + 7 %
- dont droits mécaniques 47 M€ 43 M€ - 7 %
Droits éditoriaux hors Sacem (25 %) 45 M€ 51 M€ + 13 %
Partitions (9 %) 18 M€ 17 M€ - 5 %
Revenus non éditoriaux (1%) 3 M€ 2 M€ - 15 %
Le chiffre d’affaires des sociétés d’édition ayant participé à l’étude affiche une légère augmentation, de 3,6% à périmètre constant, à 196 millions d’euros. 80 % de ce chiffre provient des majors (contre 82 % en 2010). Les droits Sacem/SDRM, qui comptent pour 64 % du chiffre d’affaires total, progressent de 2 %, portés par la croissance des droits d’exécution publique (qui compense largement la baisse des droits mécaniques). 25 % du C.A. est généré par les droits éditoriaux hors Sacem, en hausse de 13%, principalement grâce aux revenus de synchronisation. A noter que, de 2007 à 2011, l’ensemble des droits Sacem payés aux éditeurs ont augmenté de 2%, avec 19 % de plus pour les droits d’exécution publique et 24 % de moins pour les droits mécaniques.
Répartition géographique des droits Sacem 2010 2011
Répertoire local France 19 % 19 %
Répertoire reste de l’UE 24 % 23 %
Répertoire monde hors UE 57 % 58 %
A noter qu’au sein de l’Union européenne, les droits Sacem sont répartis à 46 % entre le répertoire local et 54 % en provenance du reste de l’Union.
Répartition des droits éditoriaux hors Sacem 2010 2011
Synchronisation 55 % 63 %
Perception étrangères directes 30 % 26 %
Commissions de gestion 2 % 2 %
Licences graphiques 2 % 2 %
Droits de reprographie SEAM 3 % 3 %
Grands droits 2 % 1 %
Autres droits éditoriaux 5 % 3 %
Les droits éditoriaux hors Sacem ont progressé globalement de 13 % en 2011. Ils sont principalement composés des revenus de synchronisation (31 M€), en croissance de 31 %, et des perceptions étrangères directes, qui restent stables en valeur entre 2010 et 2011 (13 M€).
Principales données de gestion 2010 2011 Evol.
Marge brute des droits éditoriaux 55 M€ 57 M€ + 3 %
Marge brute des revenus non éditoriaux* 12 M€ 11 M€ - 2 %
Résultat d’exploitation 19,1 M€ 24,6 M€ + 29 %
Le taux de marge brute des droits éditoriaux recule légèrement, passant de 34 % en 2010 à 33 % en 2011. Celui des droits non éditoriaux (Grands droits et Partitions inclus) est en augmentation, passant de 49 % en 2010 à 52 % en 2011. Quant à la forte variation du résultat d’exploitation, elle provient d’un nombre très limité d’acteurs. 48 % de l’échantillon présentent une baisse de résultat en 2011 et 46 % affichent une baisse du ratio de résultat d’exploitation rapporté à leur chiffre d’affaires.
Investissements et financements 2010 2011 Evol.
Avances récupérables 9,8 M€ 9,2 M€ - 6 %
Solde des avances non récupérées 32,1 M€ 32 M€ -
Répartition des avances versées
Auteurs confirmés 75 % 64 % - 19 % en valeur
Nouveaux talents 18 % 22 % + 18 % en valeur
Export 7 % 14 %
Le montant des avances versées est globalement en recul entre 2010 et 2011, mais 58 % de l’échantillon présente un montant d’avances en progression sur la période. « Les avances non récupérées étant restées stables par rapport à 2010, ces deux évolutions combinées indique que le rythme de recoupement des avances en très légère baisse », relève l’étude. Concernant la répartition des avances par type d’auteurs, on notera que celles versées aux nouveaux talents sont en hausse. « Malgré l’environnement économique difficile, les éditeurs maintiennent leurs investissements dans la création, particulièrement en faveur des jeunes créateurs » souligne l’étude. Quant à la forte variation des avances l’export, elle est liée à une opération exceptionnelle en 2011.
En termes de sources de financement, 63 % des éditeurs de l’échantillon se financent sur fonds propres et comptes courants d’actionnaires, 21 % seulement bénéficient de financements bancaires. 30 % des participants ont fait part de difficultés de financement, lesquelles concernent les emprunts bancaires et les subventions. Enfin, en matière de ressources humaines, l’effectif total reste stable avec 283 postes en 2011 (en CDI à 95 %) contre 285 en 2010. On notera une forte représentativité des femmes, majoritaires (59 %). Le nombre moyen de salariés se maintient à 11 personnes, avec quelques disparités puisque 31 % des répondants (qui comptent pour 46 % de l’effectif total) ont plus de 20 salariés tandis que 50 % ont entre 1 et 5 salariés. Les fonctions direction, artistique, commercial et synchronisation représentent 43 % des effectifs, tandis que l’administratif (royalties, copyright, finance, juridique) compte pour 36 %.
Les préoccupations des éditeurs
Au final, l’étude liste les préoccupations des éditeurs. Sur la conjoncture actuelle, elles portent sur le maintien d’une trésorerie suffisante, sur la numérisation du répertoire avec l’offre légale en ligne et sa mise à disposition au public, sur la juste répartition des droits d’auteurs par la Sacem et la pérennité de ses perceptions. Ils évoquent aussi la difficulté à être éditeur à 100 % de leurs nouveautés (« il devient presque impossible de ne pas coéditer avec les producteurs des enregistrements des œuvres que nous éditons ») et l’augmentation du nombre de projets de jeunes talents « pour lesquels l’éditeur doit devenir le producteur, faute de labels assumant le rôle de découvreur de talents ».
Sur l’évolution du secteur de l’édition à moyen et long terme, ils se disent préoccupés par l’accaparement des droits par les producteurs de disques (majors et indépendants importants), les producteurs de spectacles et les médias (TV et radios), par la « projection à moyen terme sur des revenus digitaux ridiculement bas », par la pérennité de la copie privée au niveau européen, la discussion et le vote au Parlement européen de la directive sur la gestion collective des droits, l’avenir du projet de Centre National de la Musique, ainsi que par la mise en place et la gouvernance du projet « Global Repertoire Database ».