Disparitions...
Teri Moise
La chanteuse française d’origine haïtienne Teri Moise s’est donné la mort le 7 mai dans un hôtel de Madrid, à l’âge de 43 ans. Née à Los Angeles, elle s’était plus tard installée en France pour suivre ses études en Lettres à la Sorbonne et entamer une activité de choriste et d’auteure-compositrice. Signée sur le label Source, elle avait été découverte en 1996 avec le titre « Les poèmes de Michelle ». Initiatrice d'une pop-soul à la française (son style est décrit comme un « mélange de groove, de poésie folk et de spleen aérien », Teri Moise avait séduit le grand public avec son premier album éponyme empreint de discrètes touches caribéennes et son écriture soignée. Ce qui lui valut de connaître un vif succès commercial (certifié disque d’or), de remporter une Victoire de la Musique en 1997 dans la catégorie meilleure artiste-interprète francophone et de se produire sur la scène de l’Olympia et dans divers festivals à travers le monde. Un deuxième album, également éponyme et toujours produit par Source, était sorti en 1998 mais sans connaître, tous comme ses singles, le même succès. L'artiste était ensuite tombée peu à peu dans l'oubli. La Sacem, dont elle était membre et qui lui avait décerné le Prix Vincent Scotto en 1997, « rend hommage à cette femme du monde au répertoire poétique dont les plus belles œuvres, telles que Les Poèmes de Michelle, Je serai là et Fais Semblant marquent les mémoires ».
Henri Dutilleux
Le compositeur Henri Dutilleux est décédé le 22 mai à Paris, à l’âge de 97 ans. Connu pour son exigence et son perfectionnisme musical, qualifié de « moderne classique », il laisse derrière lui un catalogue d’œuvres majeures et incontournables, à Ia fois audacieuses et accessibles, dont la dernière, « Correspondances pour soprano et orchestre » était parue en janvier dernier chez Deutsche Grammophon pour son 97ème anniversaire. Héritier de Debussy, transcendant les modes, Henri Dutilleux avait même su apprivoiser le public rebelle à Ia musique contemporaine, dont il était l’un des compositeurs les plus joués au monde. « C'est un des très rares compositeurs contemporains qui est rentré dans le répertoire de son vivant. II avait cela en commun avec Olivier Messiaen. Son œuvre restera intensément présente après son décès », a indiqué à I'AFP le chef d’orchestre Laurent Petitgirard, président de Ia Sacem. Pour celle-ci, « c'est une grande figure française de la musique contemporaine qui s'éteint et laisse derrière elle un catalogue d'œuvres relativement peu nombreuses, lentement élaborées, mais d'une extraordinaire qualité. Les partitions d'Henri Dutilleux ont été créées par les plus grands interprètes des 20ème et 21ème siècles, dont Mstislav Rostropovitch et Isaac Stern ». Henri Dutilleux avait remporté de nombreux prix prestigieux dont le Grand Prix national de la Musique pour l'ensemble de son œuvre en 1967, le Prix International Maurice Ravel et le Prix du Conseil International de la Musique en 1987, le Prix Praemium Imperial du Japon en 1994, le Royal Philharmonic Society Awards en 1998, le Prix Ernst von Siemens en 2005, une distinction considérée comme le « Nobel de la musique »… Il fut élu membre honoraire de l'Academia Nazionale Santa Cecilia de Rome en 1993, membre de la Royal Academy of Music de Londres en 1996, membre associé de l'Académie Royale de Belgique, membre honoraire de l'American Academy and Institute of Arts and Letters of New York. En janvier 2004 à la dignité de Grand-Croix de la Légion d'honneur, il avait s’était vu remettre en 2010 la médaille d’Or Sacem, saluant son exceptionnelle carrière. Il restera l’un des plus grands compositeurs du XXe siècle, avec Ravel, Debussy, Messiaen et Boulez.
Georges Moustaki
Georges Moustaki est décédé le 23 mai à Nice, à l’âge de 79 ans, des suites d’un emphysème qui l’empêchait de chanter depuis plusieurs années. Né à Alexandrie (Egypte) de parents grecs de religion juive et de langue italienne, il s’était installé à Paris à 17 ans. Sa rencontre avec Georges Brassens fut déterminante. Ce dernier l’encouragea à persévérer dans la chanson, le prit pour élève et l’intronisa dans les nuits de Saint-Germain-des-Prés. Tout aussi déterminante fut sa rencontre avec Edith Piaf pour qui il écrira « Milord » en 1958. Georges Moustaki signa 300 chansons pour des interprètes tels que Colette Renard, Yves Montand, Barbara (La Dame brune), Juliette Greco, Serge Reggiani (Sarah, Ma liberté, Madame Nostalgie)… Mais il rêvait d’être reconnu comme auteur-compositeur-interprète. Son premier 45 tours « Le métèque » (tout d’abord chanté par Pia Colombo) connut un succès immédiat en 1969 qui lui permit d’enregistrer un album, récompensé d’un Grand prix de l’Académie Charles Cros et de se produire en vedette à Bobino en 1970. Ce fut ensuite 40 ans de carrière… Georges Moustaki laisse 21 albums studio, 7 albums live (dont 6 doubles), 6 compilations et coffrets, 12 musiques originales de films et 9 livres (romans, mémoires…). Pour son dernier album, « Solitaire », en 2008, il avait repris ses plus belles chansons en duo avec Cali, Stacey Kent, China Forbes, Sarah Murcia et Vincent Delerm… Le 8 janvier 2009, Georges Moustaki était monté sur scène, à Barcelone, pour expliquer que ses problèmes respiratoires ne lui permettaient pas d'assurer le concert, et le 14 octobre 2011, il annonçait à la presse qu'il était définitivement incapable de chanter
L’annonce de sa disparition a suscité une vive émotion et de nombreuses réactions. Florilège : « un artiste engagé qui portait des valeurs humanistes » (Aurélie Filippetti), « un homme raffiné, élégant, qui avait une douceur infinie et puis le talent » (Juliette Gréco), « le charme inouï d’un très grand séducteur dont la nonchalance cachait un goût du travail et de l’orfèvrerie extrêmement prononcé » (Claude Lemesle), « un des plus grands ambassadeurs de la chanson française », dont les chansons « sont éternelles » (Mireille Mathieu), « il nous laisse des chansons sublimes » (Line Renaud), « un homme de convictions et d’engagements » (Nicoletta), « Ses chansons auront marqué plusieurs générations de Français. C’était un homme aux chansons douces mais aux idées fortes » (François Hollande), « Citoyen du monde épris de liberté, rebelle indéfectible jusqu'à ses derniers jours, celui qui aimait s'appeler lui-même " Le Métèque " et ne craignait pas d'affirmer que " l'homme descend du songe ", demeurera pour tous le symbole généreux de l'artiste engagé » (Pierre Delanoé), « c'est une des dernières légendes, artiste et poète, qui disparaît ! » (Pascal Nègre, sur Twitter, en ajoutant : « Ses plus grands succès sont chez Universal ! »)..