Crispation sur les droits d’auteur au forum e-G8
Le débat sur « la propriété intellectuelle et l’économie de la culture à l’âge digital », le 24 mai, a tourné à la foire d’empoigne entre industriels et politiques d’un côté, défenseurs d’un internet libre de l’autre. « Si on ne protège pas le droit d’auteur, on assèche la création et on assistera à sa mort » a déclaré le ministre de la Culture Frédéric Mitterrand, qui s’est fait un ardent défenseur de l’Hadopi. De même que Pascal Nègre, président d’Universal Music France, qui a souligné que les industries du divertissement et de la culture pèsent 3 000 milliards et constituent « une immense source de création, d’emplois, de croissance et de revenus fiscaux », alors qu’elles prennent des risques en misant sur de nouveaux talents « dont seulement un sur huit ramènera de l’argent ». Il dit attendre du G8 un nouvel âge de partenariat entre les Etats, l’industrie technologique et l’industrie artistique. « Nous devons reconnaître l’importance du droit d’auteur dans l’ère numérique et développer des standards de coopération internationales pour lutter contre le piratage », a ajouté Harmut Ostrowski, PDG du groupe Bertelsmann, qui juge primordial de protéger la propriété intellectuelle car « sans contenu, Internet n’est qu’une suite de boîtes vides ».
John Perry Barlow, ancien parolier du groupe Grateful Dead, co-fondateur de l’Electronic Frontier Foundation (EFF) et auteur de la Déclaration d’indépendance du cyberespace, s’est déclaré en désaccord radical avec les propos précédents et farouchement opposé à toute mesure répressive sur le web. « Si on commence par la propriété intellectuelle, on finira par contrôler toute l’expression », estime-t-il. « Ce dont nous parlons ici, ce sont de meilleures incitations pour les créateurs et non pas un plus gros profit pour les intermédiaires ». Avis partagé par Jérémie Zimmerman, porte-parole de la Quadrature du Net, qui ajoute que « les gens qui téléchargent le plus de fichiers sur Internet sont ceux qui dépensent le plus » en biens culturels et que « lorsqu’on aime, on est toujours prêt à soutenir la création ».
Bref, visiblement un grand fossé entre les deux camps. Les défenseurs de la libre expression prônent des accords volontaires, mais s’ils échouent, « les gouvernements ont un droit et un devoir de protéger le droit d’auteur et la propriété intellectuelle » considère Jim Gianapoulos, patron de la Twentieth Century Fox. Patrick Zelnik, PDG de Naïve, prône un juste milieu, estimant qu’entre régulation et liberté, « il y a quelque chose qui s’appelle le libéralisme tempéré ».
Le forum a été évidemment l’occasion de soulever la question du financement de la création. « Parmi vous, il y a également des acteurs dont la taille et les capacités de pénétration inédites les amènent à devoir assumer des responsabilités nouvelles quant au financement de la création. Il en va de l’intérêt de tous, pouvoirs publics comme acteurs privés – car les seules logiques du profit ne suffisent pas stabiliser ce nouvel écosystème qui se cherche » a lancé Frédéric Mitterrand lors d’une réception au Louvre à l’occasion du e-G8.