DOSSIER : La Sacem fait sa révolution
Newsletter n° 2 – Jeudi 6 juillet 2006
« Le grand débat de la licence globale est derrière nous » s’est félicité Bernard Miyet, président du directoire, lors du traditionnel déjeuner de presse de la Sacem, le 26 juin dernier. Plus que jamais, le contexte juridique et réglementaire est au cœur des préoccupations de la société des auteurs, tant à l’échelle nationale, européenne ou internationale, reléguant au second plan ses résultats 2005. Qu’il s’agisse du projet de loi DADVSI (le texte n’était pas encore voté par le Parlement au moment du déjeuner de presse) ou des dossiers en cours au sein de la Commission européenne. Sous le thème « La Sacem dans un monde ouvert », le président du directoire a évoqué les sujets du moment.
Tracasseries bruxelloises
La Sacem s’inquiète de la notification de griefs adressée par Bruxelles fin janvier à la Confédération internationale des sociétés d’auteurs et compositeurs (Cisac) et à 24 sociétés d’auteurs européennes de droit d’exécution publique. La DG concurrence considère que les accords de réciprocité pourraient être contraires aux règles de la concurrence communautaire et privilégie la mise en concurrence des sociétés d’auteurs à l’égard des usagers. La procédure n’est pas encore achevée, la Cisac et les sociétés concernées ont été auditionnées par la Commission européenne à la mi-juin. Par ailleurs, la DG marché intérieur s’est penchée sur les conditions de délivrance des autorisations dans le domaine de l’exploitation en ligne, avec une interprétation radicalement différente. « En présence des deux approches contradictoires, la gestion collective des droits d’auteur en Europe est dans une phase d’incertitude et de reconstruction » convient Bernard Miyet. Il rappelle que parallèlement, les sociétés d’auteurs réfléchissent à la mise au point d’un régime de délivrance de licences multi territoires et multi répertoires, pour « répondre au souhait des usagers d’obtenir, au travers d’un guichet unique, tous les droits qui leur sont nécessaires, tout en préservant les intérêts des ayants droit et en promouvant une nécessaire coopération entre elles ». En fin, la Commission européenne se penche sur l’avenir des systèmes de rémunération pour copie privée qui existent dans les différents Etats européens. « Confrontée à une offensive majeure des fabricants de matériel électronique, Bruxelles a envoyé une étude d’impact à toutes les sociétés d’auteurs, avec deux justifications. Premier argument : les DRM arrivent, il faut donc prévoir la suppression de la copie privée, ce qui est invraisemblable ; le second est économique et relatif aux disparités sur les redevances dans les différents marchés. L’Angleterre où il n’y a pas de redevance, ne vend pas plus de CD ou DVD vierges. C’est aberrant d’entendre une telle logique. On attend la notification de la commission mixte paritaire, cela promet un débat politique intéressant…, ironise Bernard Miyet.
Nouveaux services aux sociétaires
La Sacem profite de l’occasion pour faire le point sur ses innovations technologiques destinées à améliorer les services aux sociétaires et développer la coopération entre sociétés d’auteurs. Avec tout d’abord de nouveaux services disponibles sur son portail, comme « comment lire son feuillet de répartition » (une aide en ligne pour décoder des relevés complexes). C’est aussi le lancement de Catel, le catalogue des œuvres, permettant la recherche par titre, par tiers ou selon le code ISWC et indiquant les auteurs et éditeurs. A noter que c’est la première fois que la Sacem ouvre sa base de données, avec deux accès possibles : grand public ou sociétaires, lesquels ont accès à leur « catalogue » et aux taux de part sur chaque œuvre (auteurs, compositeurs, arrangeurs…). La Sacem s’est aussi dotée d’une nouvelle plateforme de gestion de ces membres, dénommée Oscar, qui a permis de réduire considérablement le délai de traitement des dossiers d’admission (7 343 nouveaux membres en 2005, dont 146 éditeurs), passé en un an de 6 mois à 3 semaines.
La qualité des répartitions est aussi une priorité, avec le développement récent de MIPS, un moteur d’identification simple et intuitif, au « taux de pertinence élevé » et « qui intéresse d’autres acteurs du secteur » souligne Michel Allain, directeur de l’organisation et des services d’information. Autre nouveauté : Ulysse, un outil de traitement des diffusions, permettant la traçabilité et de gérer les déclarations des diffuseurs. Opérationnel sur la radio, il sera étendu début 2007 à la télévision après une phase de test en fin d’année.
S’adapter aux nouvelles technologies
En terme de coopération internationale, la Sacem a une implication historique dans les orientations politiques de la Cisac, notamment sur les développements informatiques communs. Elle est notamment à l’origine du réseau Fastrack, établi en France (la Sacem en est le prestataire de service) et qui regroupe 12 des plus importantes sociétés d’auteurs. « L’atout majeur de cette base de données décentralisée est son protocole d’échange », protocole que Fastrack a vendu à la Cisac pour créer le réseau CIS Net, auquel adhèrent de nombreuses sociétés d’auteur dans le monde. La Sacem exporte donc son savoir-faire (« l’importance et la qualité de sa documentation sont reconnus mondialement ») en matière de développement de normes et d’outils internationaux. Elle a aussi mis au point un extranet d’échanges unique en Europe, baptisé Idols (pour International Documentation and Licensing System). Cette plateforme concerne d’autres acteurs de la filière, s’ouvrant vers les producteurs de disques et au dernier trimestre 2006 vers les fournisseurs de services. Ses avantages : un système « transparent » (à la base mis en œuvre pour les contrats de centralisation), un seul point de déclaration pour l’exploitant de l’œuvre et, pour toutes les parties concernées, un accès en temps réel aux informations déclarées et aux traitements effectués. Enfin, la Sacem a rejoint l’organisation DDEX (Digital Data Exchange) dans la mise en œuvre d’un standard international d’identification des données associées aux œuvres musicales qui circulent sur le « on line ». C’est une norme d’échange entre les différents acteurs de la filière, puisque l’initiative regroupe plusieurs sociétés d’auteurs (Ascap, HFA, MCPS/PRS, SGAE), l’ensemble des majors du disque, ainsi que Apple, Microsoft et RealNetworks. Le système devrait être opérationnel d’ici la fin de l’année.
Un développement maîtrisé
« Nous sommes bien avancés mais il reste encore du travail. La Sacem a pris un bon virage. Il s’agit d’une transformation profonde », nous commente Michel Allain dans un entretien de ce jour. « C’est un chantier important. Nous sommes dans un process de « e-transformation » de l’entreprise, avec la mise au point des outils, mais aussi l’appropriation de ces outils par les collaborateurs et les modifications des process de travail. C’est une culture d’entreprise qui évolue, pour passer d’une société administrative à une notion de société de services dans un monde compétitif ». La Sacem fait sa révolution technologique ? « Elle fait sa révolution tout court ! » résume-t-il.
Tous ces développements ont un coût conséquent (les services informatiques de la Sacem représentent une équipe de 97 personnes) mais qui reste, somme toute, « très raisonnable ». L’informatique a pesé pour « 2,7 % du CA de l’entreprise en 2005 » confie Michel Allain, « soit bien en dessous des ratios habituels, de l’ordre de 10 à 12 % du C.A. dans les banques ». On peut donc parler de développement parfaitement maîtrisé.
N.B. : Les résultats Sacem 2005 (détail des perceptions, répartitions, meilleurs scores) et la composition du conseil d’administration 2006/2007) seront abordés dans notre prochaine parution.
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